Photographie au dessus de l'animation d'une cour durant le confinement en 2020 par Klara Beck
Fenêtre sur cour
8 juin 2020
 

Cazes-haut


-Klara Beck-

Après avoir travaillé plusieurs années à Rome au sein de la FAO (Nations Unies) comme ingénieur agronome, Laurent Thomas, et Patricia Grimigni, qui elle, y terminait son cycle d’études de sciences humaines, se sont installés avec leurs deux enfants Arnaud et Elena en 1998 à Cazes-Haut près de Lavaur dans le Tarn. Ils possèdent une bergerie de 300 brebis Lacaune, sur 80 hectares de prairie. Si la bergerie date du précédent propriétaire, un rapatrié du Maroc, la fromagerie est quant à elle récente. Les produits sont labellisés bio depuis décembre 2015, à l’issue des 3 ans de conversion.
L’exploitation ressemble à une ruche. En plus de Laurent, Patricia et Arnaud, il n’y a pas trop de 3 employés et d’un stagiaire pour tout faire : l’élevage, la production de fourrage, la fromagerie ou la commercialisation des fromages, les tâches sont variées et tout le monde s’affaire, pour se retrouver à un moment réunis pour déjeuner. Mais là encore une urgence peut survenir, ce jour-là pluie battante : vite rentrer les moutons !
Les brebis sortent tous les jours (sauf par mauvais temps) à partir du printemps, après la traite du matin, dans des espaces assez variés: forêts, pâturages. Elle reviennent le soir pour allaiter leurs petits, puis vient le moment de la traite avec distribution du grain. C’est la grande excitation, petites bousculades pour se presser vers la salle de traite, régulée par Jack le chien de troupeau, qui scrute le moindre regard de son maitre pour remettre les brebis dans le rang. Le moment de la traite est aussi le moment où l’on peut examiner les brebis, détecter des problèmes. Là un agneau trop chétif, Laurent regarde la mère et constate des mamelles lourdes, une mammite, rapidement une injection pour tenter de juguler l’infection.
Ici tout est fait maison même l’orge pour les bêtes est cultivé par leurs soins. La dynamique bio induit des associations de plantes qui se protègent et se stimulent entre elles, ce qui évite l’usage d’engrais et de pesticides. Mais les contraintes de chaque plante, liées entre autres à la météo, peuvent mettre l’exploitant devant des choix cornéliens et dans des urgences prioritaires. Ainsi Arnaud venait de passer la nuit sur son tracteur à presser la luzerne avant que la pluie annoncée ne vienne tremper les andains. Ce genre de situation n’est pas exceptionnelle, il me racontait que son record en la matière était de 25 H de fenaison ininterrompue.
Après avoir passé son bac pro au lycée agricole de Verdalle (Montagne Noire), Arnaud travaille avec ses parents en vue de reprendre l’exploitation. Il est passionné de rodéo sur taureaux et guide le troupeau de brebis sur son cheval, un quarter horse américain, aidé par Jack, le chien de berger. En passionnés et perfectionnistes, leurs vacances sont orientées par les rencontres avec d’autres éleveurs, d’autres producteurs de fromage. Laurent me montrait des moules en bois ainsi que le tranche-caillé en bois ramenés des montagnes de Zakopane en Pologne, qui servent pour certains fromages. Arnaud est lui parti l’été dernier au Canada faire un stage dans une bergerie. Ainsi, on retrouve dans leur fromagerie des bribes de techniques d’ici et d’ailleurs qu’ils on adaptées pour créer des fromages aujourd’hui reconnus à une large échelle. Ils sont représentés sur les marchés locaux, chez des fromagers à Toulouse et une grosse partie de leur production part tous les lundis à Rungis d’où elle est envoyée dans le monde entier. Leurs fromages sont atypiques, caillés et moulés à la main, affinés sur des planches de pin des Pyrénées. Leur spécialité est le Saint Germier, un fromage à pâte molle et à croûte lavée, du format reblochon.
Patricia s’occupe de la commercialisation en général. En plus des livraisons et expéditions, elle tient les marchés trois fois par semaine. Elle a également repris des études de droit par correspondance et se rend régulièrement à Paris pour travailler en bibliothèque à la faculté d’Assas. Elle veut devenir avocate, ouvrir une nouvelle page quand leur fils reprendra l’exploitation.
Elena, la cadette, est encore au lycée. Elle participe occasionnellement aux divers travaux de l’exploitation, elle est capable d’intervenir en fromagerie et en bergerie. Elle est cavalière, passionnée de chevaux.